lundi 14 avril 2014

Livres : à nous deux !

Ouf, ça y est : mon ménage de printemps est terminé. Les sortantes sont à la cave (j'allais écrire au purgatoire), dans l'attente de remonter un jour — qui sait ? — ou d'une nouvelle famille. Je peux enfin accéder à mon salon et profiter de ma banquette :-). Il ne me reste plus qu'à mettre un peu d'ordre dans les piles de livres posées à même le sol et par la même occasion vous parler un peu de ceux que j'ai bien aimés ces derniers mois.


- "Galeristes", par Anne MARTIN-FUGIER (aux éditions Actes Sud, 2010)

Ayant toujours été fasciné par cette profession (quel collectionneur ne rêve pas un jour de franchir le pas et de faire de sa passion pour l'art son métier ?), je dévore tous les ouvrages qui lui sont consacrés. Dans ce dernier, l'auteur, familière des galeries parisiennes depuis le milieu des années 70, nous parle de onze galeristes dont le métier consiste à déceler des talents, les soutenir et bien sûr à les vendre. Une profession en pleine mutation à l'heure d'Internet et dont l'un de ses représentants, Albert LOEB, est (comme moi ;-) bien pessimiste : C'est un métier fini. Je pense qu'on regardera de moins en moins la peinture. Rien n'est éternel. Nous sommes dans de telles mutations mentales de l'homme, de la culture, tout va tellement vite. Je crois qu'il y aura bientôt très peu de jeunes gens pour aller au Louvre. Vous allez me citer, je le sais bien, les longues files d'attente devant les musées. Moi j'y vois seulement le résultat de la politique de communication, et nullement le goût de la peinture. On parlait naguère beaucoup moins d'art mais le goût pour l'art était plus authentique qu'aujourd'hui.

Un ouvrage très intéressant, bourré d'anecdotes sur le monde de l'art et bien sûr absolument indispensable à tout futur galeriste ;-).


- "Éphémère éternité", par Georges MOUSTAKI (aux éditions Cherche midi, 2013)

Fan inconditionnel de l'artiste et de l'homme, je ne pouvais pas manquer ce petit livre où cet humaniste comme il n'en subsiste plus guère aujourd'hui nous parle de son métier de faiseur de chansons et de ses fabuleuses rencontres. L'homme a en effet eu une vie de rêve, cotoyant les plus grands artistes de son temps. La seconde partie de l'ouvrage rassemble les textes des ses plus belles chansons, comme "Sans la nommer", "Ma solitude", "Les mères juives", "Il est trop tard", dont la seule lecture est plaisir.

Dans l'une d'entre elles, "La philosophie", le poète dit que nous avons toute la vie pour nous amuser (aimer, être curieux, apprendre, rencontrer...) et toute la mort pour nous reposer. C'est bien vrai, ça ! Alors suivons bien son très précieux conseil afin d'arriver devant la grande faucheuse les plus fatigués possibles :-).


- "La Borne, 1940-1980", par Maud LEONHARDT SANTINI (édité en 2013 par la galerie Hugues MAGEN, à New York)

Un superbe ouvrage de près de 300 pages, richement illustré et relié, pour être incollable sur ce fameux centre de céramique et ses artistes (les LERAT, JOULIA, MOHY, etc.), longtemps et toujours opposé à celui de Vallauris. Incontournable si le monde du grès vous passionne ou si vous avez envie d'en savoir plus dans ce domaine.


Incroyable mais vrai : l'ami Salvatore PARISI a fait partie de l'aventure de la Borne ! C'est le "moustachu rigolo" à la pelle sur la gauche de cette photo, reproduite dans l'ouvrage (cliquez dessus pour l'agrandir). Un Salva jeune (24 ans) et beau...


"JOULIA" (co édité en 2011 par les galeries Anne-Sophie DUVAL et Mouvements modernes)

Superbe coffret renfermant deux livrets très intéressants : "Mémoires", qui rassemble des textes publiés du vivant de l'artiste (illustrés de superbes photos d'époque) éclairant le contexte dans lequel l'oeuvre de l'artiste a été dévoilée au public à parti des années 50 et "Exposition", qui le complète en présentant les oeuvres choisies par les galeries Anne-Sophie DUVAL et Mouvements modernes pour leur exposition de 2011. Indispensable à tout "jouliaphile" !


"Yves SAINT-LAURENT, les derniers jours de Babylone", par Luc CASTEL (aux éditions du Regard, 2012)

Un "beau livre", particulièrement émouvant et qui ne peut que faire réfléchir et un peu angoisser tout collectionneur digne de ce nom.

Je laisse la parole à Marie-José SIRACH qui en a très bien parlé dans l'Humanité du 27 décembre 2013 :

Le photographe 
Luc Castel 
a saisi sur pellicule 
le déménagement de l’appartement du grand couturier de Pierre Bergé avant que 
les biens ne soient dispersés.

Ouvrir cet ouvrage, c’est pousser la porte du somptueux appartement de la rue de Babylone, dans le très chic 7e  arrondissement de Paris. Doucement, animé par un brin de curiosité, guidé par le désir de découvrir ce qui se cache derrière ces murs hauts de plafond, ces boiseries, ces portes à double battant qui s’ouvraient alors et se refermaient sur trésors et merveilles. Peintures, marbres, bronzes, meubles arts déco, livres, objets souvenirs, photographies… Des objets précieux, surprenants, déconcertants parfois, glanés çà et là, aux puces ou dans les meilleures galeries. Goya, Picasso, Warhol, Braque, Léger, Géricault, Brancusi se côtoyaient dans un apparent désordre pictural, mais l’accrochage révèle un regard tout en harmonie, témoignant de coups de foudre pour un artiste, un motif, une palette de couleurs, des reflets mystérieux où le regard se noie à l’infini.

Luc Castel a eu l’immense privilège de pénétrer dans la demeure de ce couple mythique et de photographier le salon, la bibliothèque, l’entrée, chaque pièce de vie chargée de souvenirs, de trésors accumulés au fil du temps. Avant. Avant que n’arrive une armée d’hommes en bleu chargés du déménagement. Les objets, répertoriés, triés, gisent là, sur le sol, enveloppés dans du papier de soie avant d’être glissés dans du papier bulle. Castel s’est fait petite souris, ne pipant mot, l’œil aux aguets, pour restituer cet étrange ballet de toiles, de sculptures, de meubles, de luminaires. Hier vivants, ils semblent attendre, nous regarder, silencieusement. On devine de légers soupirs, on les sent prêts pour l’inconnu, un nouveau voyage vers d’autres acquéreurs, d’autres amoureux. Cet appartement, c’était aussi un peu le leur. Une main en bronze s’échappe d’un carton ; un marbre emballé façon Christo trône sur un chevet. Rien n’échappe à l’œil de Castel. Encore moins quand il s’agit de photographier en plongée l’alignement des acheteurs lors des enchères chez Christie’s. Sous la coupole du Grand Palais, une grand-messe s’est déroulée le 25  janvier 2009. Une cérémonie qui a vu se disperser tous ces biens sous l’œil attentif, dans une salle à l’écart, de Pierre Bergé.

Luc Castel est retourné sur les lieux, quelques jours après. Un immense sentiment de solitude vous saisit en traversant ces grandes pièces désormais nues. C’est entre ces murs qu’Yves Saint Laurent aura vécu, créé, imaginé robes et tailleurs, formes et couleurs, mélanges de matières pour habiller et sublimer les femmes durant près d’un demi-siècle. Le soleil étire ses reflets à travers les immenses fenêtres. Plus rien n’interfère. Sur la pellicule de Castel, on éprouve le poids du silence, celui du souvenir, d’une présence qui n’est plus mais qui semble hanter à jamais ces lieux…


"Babylone" était auparavant la demeure de Marie CUTTOLI, grande amatrice d'art et mécène, et de son mari, le biologiste Henri LAUGIER. Espérons qu'après le départ de SAINT-LAURENT et de Pierre BERGÉ le lieu fasse à nouveau le bonheur d'un collectionneur fou...

A méditer, les quelques lignes de Pierre BERGÉ qui ouvrent l'ouvrage :

L'art appartient à tout le monde. L'art est au-dessus de tout... C'est comme les arbres ou les nuages, qui appartiennent à tout le monde. Alors, si on a la chance de pouvoir, pendant un temps, posséder des oeuvres d'art, ou plutôt de les héberger, c'est formidable, mais il ne faut pas oublier qu'on n'en est pas vraiment les propriétaires.

A suivre (j'essaierai de vous parler de deux ou trois ouvrages tous les soirs)...

1 commentaire:

  1. Pour Salvatore : le temps passe ...les cheveux trépassent ..
    (c est pour rire , j adore les cranes nus , tou était tres beau et tou est toujours tres beau )

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